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Depuis le jeudi 29 octobre 2020 au soir, le gouvernement a ordonné un nouveau confinement de la population pour lutter contre la pandémie de la Covid-19. C’est donc l’occasion pour moi de reprendre mes médiations de confinement, en espérant qu’elles puissent être un réconfort et un soutien dans ces temps si compliqués

Dimanche 1er novembre 2020
Fête de tous les saints
Confinement II – 3e jour

Enguerrand Quarton
Le couronnement de la Vierge
Villeneuve-lès-Avignon, 1454

Sur les textes de la Toussaint

Au temps de l’automne et de l’hiver arrivant, la tentation sera grande d’entrer dans ce deuxième confinement comme on entre en hibernation. L’expérience du printemps fut éprouvante, pourquoi celle de l’hiver ne serait-elle pas au moins autant ? La tentation de suspendre le temps pour suspendre l’épreuve et rêver à des jours meilleurs est bel et bien à portée de la main. Nous sommes à deux doigts seulement de crier : « Bienheureux les ours, l’hibernation est eux ! »

Le surcroît d’horreur, de chocs et de larmes apporté par la tragédie de l’attentat à Nice ne fait que conforter cette tentation de s’abstraire du monde, de fuir loin de ce monde — même si ce n’est que dans le fond de notre salon ou de notre chambre !

Mais, au début de ce confinement, nous célébrons aujourd’hui la fête de tous les saints. Cette fête qui ouvre, non pas de tant sur un avenir, mais sur l’éternité. Elle plonge notre regard dans celui de Dieu pour goûter avec lui cette dilatation du temps opérée par son immense amour pour nous. Car l’éternité, c’est le temps de saints.

Bien loin de nous repousser dans nos retranchements, la fête de Toussaint nous invite à dilater notre cœur. Bien loin d’exacerber un sentiment de révolte, de colère ou de résistance, la fête de Toussaint nous entraîne dans la béatitude bienheureuse. « Heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés. Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu ». Les béatitudes proclamées par Jésus sont tout sauf une méthode Coué, ou une pieuse complaisance dans une situation que nous ne pouvons changer. Elles sont l’attestation que, dans les moments les plus sombres de notre existence, dans les ombres de nos doutes, dans les difficultés de notre vie, la lumière bienheureuse de la résurrection resplendit toujours ! Elles nous invitent à sortir au-delà de nous-mêmes, au-delà de nos confinements, au-delà de nos sentiments, pour entrer dans la vie du Père, dans la fraternité du Christ pour tout homme, dans le sentiment même du Tout-Puissant qui n’est autre que l’Esprit Saint.

Être Saint, ce n’est pas être plus fort que les autres ; ce n’est pas être plus courageux que les autres ; ce n’est même pas être plus fidèle que les autres. Être saint, c’est être bon de la bonté même de Dieu ; c’est d’être courageux de l’audace du Christ ; c’est être rendu fort de la puissance de l’Esprit. Ce temps de confinement s’offre donc à nous comme un temps de sainteté bien singulière, mais de sainteté tout de même. Nous pouvons en faire une occasion d’hibernation ou bien le vivre comme une chance extraordinaire de rejoindre le Christ dans l’amour du monde. La différence entre ces deux attitudes tient à l’imagination évangélique que nous saurons déployer avec la grâce de Dieu. Soyons clairs : rien ne sera facile et évident. Mais tout sera occasion d’aimer, de servir, de prier, d’intercéder, de soutenir, de compatir… de devenir un peu plus saint selon le cœur de Christ, qui, aujourd’hui encore gravit la montagne pour nous enseigner : « Heureux… ! »

P. Sylvain Brison