Dimanche 10 Mai 2020 – Cinquième dimanche de Pâques
Confinement I – 55e et dernier jour
Sur Jn 14, 1-13
L’évangile de ce jour comporte un étrange paradoxe. Jésus déclare : « Quand je serai parti vous préparer une place, je reviendrai et je vous emmènerai auprès de moi, afin que là où je suis, vous soyez, vous aussi. » (Jn 14, 3). Je ne crois pas être fondamentaliste, mais j’aime à prendre au sérieux les paroles de Jésus. Or, la promesse de Jésus semble faire défaut. En effet, Jésus est bien parti vers le Père ; il est revenu d’entre les morts, mais il a laissé ses disciples dans le monde. Il ne les a pas « emmenés ». Nous aussi, disciples actuels du Christ, nous demeurons en ce monde. Quel est donc ce paradoxe qui nous oblige à croire en la vérité des paroles de Jésus et à rester ici et maintenant dans un monde qui passe avec son lot de souffrance et de chaos ? Il nous faut prendre donc, très au sérieux, les paroles de Jésus : la conclusion de la phrase est essentielle : « afin que là où je suis, vous soyez, vous aussi. » Si nous sommes encore en ce monde, c’est donc que Jésus y demeure lui aussi puisqu’il est fidèle à sa parole. Le Christ continue de vivre en ce monde mystérieusement, en ressuscité. Le christianisme ne peut donc jamais être une « sortie du monde », une échappatoire utopiste qui nous permettrait de tenir coûte que coûte jusqu’à la libération finale. Non le christianisme est bien plus que cela, car il est la vie dans la foi au Ressuscité. Il est le chemin pour chercher et trouver le Vivant en ce monde. Il est le chemin pour apprendre à vivre le monde différemment, comme les citoyens du Royaume des cieux.
Nous sommes aujourd’hui au dernier jour du confinement, de ce grand effort collectif imposé pour le bien de tous. Que nous le voulions ou nous, il nous a tenus en retrait du monde, comme en suspens de la réalité et du temps. Nous aspirons tous légitimement à revenir à une vie normale et ordinaire. Mais demain ne sera pas comme hier. Non pas d’abord parce que le déconfinement est en quelque manière périlleux, mais par ce que le monde de demain n’est plus le monde d’hier : il est empreint de la puissance de la Résurrection. En rouvrant nos vies sur le monde, Dieu fait que nous ne le fuyons pas. Le Christ nous y envoie pour le trouver et être avec lui. Il nous faudra faire très attention : aux autres et à nous : au niveau physique pour nous préserver de tout danger sanitaire, mais aussi au niveau humain pour nous garder de toute fuite ou replis sur soi.
Ce lendemain peut-être une formidable aventure, si nous n’oublions pas ce que nous venons de vivre et si nous continuons de prendre au sérieux les paroles de Jésus : « Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ; personne ne va vers le Père sans passer par moi. » (Jn 14, 6). Jésus est le chemin qui mène à Dieu. Il est la Vérité qui rend libre. Il est la plénitude de la vie. La vie au risque du monde ne se reçoit que dans la vérité. La vérité de s’éprouve que comme un chemin. Le chemin est le Christ Vivant. Le grand Augustin nous l’a enseigné : « Non intratur in veritatem nisi per caritatem », « on ne peut entrer dans la vérité si ce n’est par la chartité ». Que ce droit chemin de l’Évangile soit notre guide demain pour « déconfiner » notre vie et notre monde aux largeurs du cœur de Dieu.
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